Action contre la faim, le CCFD-Terre Solidaire et Oxfam France saluent la décision de la France de se retirer de la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition (NAFSN), comme annoncé aujourd'hui lors de la réunion du conseil interministériel pour la coopération internationale et le développement.
(CCFD- Terre Solidaire est membre de la CIDSE en France)
Lancée dans 2012, cette initiative favorise l'intérêt des sociétés agroalimentaires transnationales au détriment de l'agriculture paysanne. Des centaines d'organisations (1) l'ont dénoncé pour ses impacts négatifs sur la sécurité alimentaire et la paysannerie dans les dix pays africains concernés (2). L’enjeu derrière le retrait de la France est de reconnaître que la solution miracle qui associe partenariats public-privé et réformes législatives pour créer un environnement favorable aux investissements des sociétés transnationales n’est pas la solution pour lutter contre la faim. Au contraire, cela va à l’encontre des intérêts des populations locales, marginalise les exploitations familiales - bien qu’elles produisent 70% de la nourriture mondiale - au profit de quelques sociétés transnationales disposant de toutes les facilités: finances, taxes, régime foncier.
Nos organisations ont maintes fois documenté les conséquences négatives d'un tel système au Burkina Faso ou en Côte d'Ivoire: accaparement des terres, dette des paysans, introduction de cultures OGM et établissement de corridors de croissance véritables paradis fiscaux pour l'agriculture, etc. (3) Retrait de la France devraient être pris en compte par les autres partenaires du réseau, tels que l’Union européenne et les États africains. L'Allemagne, un autre contributeur principal au NAFSN, doit également annoncer son retrait. Cela n'empêche aucun de ces acteurs de réparer les impacts négatifs de cette initiative, car ils en restent responsables.
Au-delà du NAFSN, la France doit tirer les leçons de cet échec et ne plus s'engager dans des projets d'investissement ni dans des initiatives présentant des défauts similaires. L'exclusion des organisations d'agriculteurs de la gouvernance, l'absence de cadres de responsabilisation et la hiérarchisation des priorités des sociétés transnationales au détriment des acteurs locaux ne constituent pas un remède à la faim.
Ainsi, alors que la faim dans le monde augmente (4), le retrait de NAFSN doit être le signal d’une véritable révision des supports mobilisés. En cohérence avec cette décision, les millions d'euros 400 que la France affecte chaque année à la sécurité alimentaire des pays du Sud devraient aller entièrement au développement de l'agroécologie paysanne. Nos organisations s'attendent à ce que cela soit enregistré et mis en œuvre lors de la révision de la stratégie française et du cadre sectoriel de l'agence de développement française, prévue dans les prochains mois.
Contacts :
Action contre la Faim: Mathieu FORTOUL - mfortoul@actioncontrelafaim.org - +33 (0) 6 77 19 03 68
CCFD-Terre Solidaire: Karine Appy - k.appy@ccfd-terresolidaire.org - +33 (0) 6 66 12 33 02
Oxfam France: Bertrand Noiret - bnoiret@oxfamfrance.org - + 33 (0) 6 85 26 01 08
Notes:
1 - Le NAFSN en Afrique, une menace pour la sécurité alimentaire, mars 2015 (en français)
2 - Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Éthiopie, Ghana, Mozambique, Tanzanie, Bénin, Malawi, Nigéria, Sénégal
3- Voir le rapport «La faim, juste un autre business - Comment la nouvelle alliance du G8 menace la sécurité alimentaire en Afrique», la revue intermédiaire 2015 publiée en français avant le sommet du G7 Schloss Elmau en 2015, la revue intermédiaire 2016 et écouter le podcast français d'Interception (France Inter) NAFSN, l'affaire de la faim
4 - Selon le rapport sur l'état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde publié par l'UNFAO en septembre dernier, un million de 815 a souffert de la faim dans le 2016, soit un million de plus que les années précédentes.